Jess et le yoga se sont trouvés en 2008, malgré le gros a priori qu'elle en avait. Jess est professeure de yoga bikram (certifiée depuis 2014) et après avoir enseigné dans plusieurs pays, elle participe à des compétitions de yoga (super expérience à ne pas juger avec trop de hâte !), coacher des athlètes et juger les championnats de France, elle décide ensuite de lancer un blog pour les yogis avertis. YogaTechnique.Net a pour vocation d’aider les pratiquants de yoga à approfondir leurs connaissances des asanas en leur fournissant du contenu gratuit.

 

C’est tout naturellement que je lui ai posé quelques questions personnelles sur sa pratique du yoga que je partage avec vous aujourdhui.

 

Comment es tu arrivée à prendre soin de toi?

Je pratiquais des sports d’impact et donc, traumatisants depuis toujours. Petite, je me suis adonnée à l’équitation, l’acrosport et le trampoline. Suite à ça, j’ai fait 10 ans de capoeira, discipline dans laquelle j’ai atteint le grade d’instructeur. En parallèle, j’ai découvert la boxe, le jiu-jitsu brésilien et le krav maga. Bien que j’ai adoré toutes ces expériences, c’est simple : aussi loin que je me souvienne, je vivais blessée. J’étais suivie par pléthore d’ostéopathes, de médecins du sport et autres kinés. Je sentais bien que ce n’était pas normal de souffrir constamment, comparé à mes partenaires d’entraînement, mais j’avais fini par admettre que mon hyperlaxité ligamentaire était la cause de tous mes maux et qu’il fallait simplement que j’accepte de vivre avec. Un beau jour, mon acupuncteur, qui était un vrai magicien, en a eu marre de me voir en consultation et m’a passé un sacré savon. J’avais 27 ans et il m’a expliqué si je voulais continuer à exiger toute cette énergie de mon corps, il fallait que je compense en lui fournissant une source de douceur et de bienveillance comme le tai-chi ou le yoga. J’ai vécu cette « prescription » comme une punition. Je me suis immédiatement imaginée assise en tailleur à faire des « Om » entourée de personnes du 3e âge et luttant pour ne pas m’endormir. Quelle ignorance, quand j’y repense ! Et puis un jour, alors que je travaillais pour une chaîne de télévision à Marseille, j’ai vu un reportage sur le yoga bikram. J’adorais le hammam, j’étais déjà souple alors je me suis dit : « ça a l’air d’être dans mes cordes et ça me parle, j’y vais ! ». Et j’y ai pris une de mes plus grandes leçons d’humilité… J’ai compris que je ne savais pas respirer et encore moins me servir de mes muscles. Pour une sportive de toujours, je vous assure que c’est une sacrée claque !

 

Quelle pratique pour ton bien être?

Ma pratique de base reste le hot yoga, dans le sens où c’est une série que j’utilise pour me « réaligner » en quelque sorte. Cependant, je ne la pratique désormais que très rarement en studio. J’utilise donc les postures de bikram sans chaleur, et ça marche très bien aussi, vu que ce sont des posture issues du hatha yoga !

 

Mais la pratique qui me passionne, celle que je pratique en priorité et qui me donne envie de dérouler mon tapis, c’est la série des 84 asanas de la lignée de Bishnu Charan Gosh. Elle est connue dans la sphère du bikram comme la série dite « avancée ». À tort, nombreux sont ceux qui pensent que c’est une version de yoga bikram réservée aux profs. En réalité, c’est la séquence de postures qu’a appris le créateur du hot yoga et dont il a tiré les 26 asanas et 2 exercices de respiration qui ont fait son succès dans le monde entier.

 

J’ai aussi essayé le hatha, l’ashtanga, le vinyasa, le modo, mais le yoga de Bishnu Gosh est celui dans lequel je me retrouve le plus. C’est une combinaison de postures à la fois accessibles et complexes qui rend le tout très intense, mais tellement complet. En capoeira, à 25 ans j’avais l’impression d’être finie. Avec les 84 asanas, à 40 ans, je ressens mon corps bien plus solide et fiable qu’il ne l’a jamais été et je me vois bien continuer comme ça encore pendant des années !

 

Quel rituel de ta pratique?

Curieusement, je n’aime pas tellement commencer par des salutations au soleil ou par des exercices de respiration. Concernant les mantras, je viens d’une lignée de yoga qui ne les incorpore pas. J’ai eu un aperçu de leur pouvoir lorsque j’ai pratiqué l’ashtanga au studio de Kino Mc Gregor à Miami, mais je n’en ressens pas le manque pour l’instant. Par contre, je dédie toujours mentalement ma pratique à quelqu’un avant de commencer. Je crois très fort au pouvoir des intentions.

 

Ensuite, il faut au moins que je « sente » ma colonne vertébrale avec quelques enchaînements chat / vache. Je fais aussi presque systématiquement quelques ouvertures de hanches type pigeon et éventuellement des étirements de l’arrière des jambes.

 

C’est seulement après ce réveil musculaire et articulaire que je peux démarrer le pranayama. Que ce soit en bikram pur ou en série dite « avancée », je ne déroge jamais à cette règle. J’adore cette technique de respiration. Je la trouve extrêmement puissante et je ne connais pas de meilleure façon de jauger ses aptitudes du jour. Je l’aime tellement que j’en ai fait un tutoriel complet sur YouTube !

 

Qu’en retires tu?

Ma pratique a transformé mon rapport à mon corps, et je ne parle pas du tout de l’aspect esthétique. Avant, je voulais à tout prix le plier à ma volonté et je supportais très mal qu’il se rebelle. C’est comme si j’étais en lutte permanente contre lui, dans un rapport de force ou de domination. Si j’avais mal à la cheville en atterrissant d’un salto arrière, je recommençais quand même parce que je n’étais pas montée assez haut ou tout simplement parce qu’il restait encore 30 minutes d’entraînement que je ne voulais surtout pas « gaspiller ». Je ne l’écoutais pas, je ne le comprenais pas. Aujourd’hui, ma priorité absolue, c’est de le chouchouter. J’ai besoin qu’il soit au top de sa forme pour tout : m’occuper de mes trois enfants, m’amener partout où j’ai besoin d’aller, supporter les nuits sans sommeil de mes petits derniers encore en bas âge, lutter contre les virus, les aléas de la vie, bref : pour tout ! J’éprouve une réelle gratitude envers mon corps et ses capacités qui m’émerveillent de jour en jour, malgré tout ce qu’il a pu endurer. Sans parler de cette connexion intérieure si profonde que je ressens et qui me permet de calmer mes émotions grâce aux merveilleux outils que nous donne le yoga

 

Qu’emportes tu dans ton sac de Yoga?

J’ai tout un attirail à disposition, mais la plupart du temps, je n’ai besoin de rien d’autre que mon tapis et de vêtement de yoga parfaitement adaptés. Comme j’ai une grande mobilité, choisir un legging n’est pas une mince affaire chez moi ! Il faut que la tissus soit très fin et stretch avec des coutures ultra résistantes pour suivre mon amplitude, mais surtout il faut qu’il ne devienne pas transparent quand il est étiré et ça, c’est bien trop rare et ça demande un vrai budget !

S’il fait froid, j’adore pratiquer avec des jambières et une ceinture de contorsionniste.

 

Quel est ton objet/ accessoire fétiche?

J’en ai deux : la sangle et la roue.

La sangle a débloqué tellement de postures que je lui dois une reconnaissance éternelle ! J’en ai moins besoin maintenant, mais de temps en temps je m’amuse avec et j’explore ma créativité.

Quant à ma roue de yoga, c’est simple : je ne pourrais plus vivre sans ! C’est mon rituel du matin et du soir pour délier ma colonne vertébrale et relâcher mes épaules et mes hanches. Je ne fais aucune posture avec, mais je l’utilise comme un accessoire d’entretien et de bien-être, comme si c’était une brosse à dents finalement…

 

Quels seraient tes conseils pour les Yoginis Tayrona?

Vous êtes votre meilleur prof ! J’insiste toujours sur les notions d’écoute et soi et d’honnêteté envers soi. Il n’y a que vous qui savez si vous vous faites du bien ou pas, et il n’y a que vous qui savez si vous donnez vraiment le meilleur de vous-même, sur le tapis et en dehors. Le prof de yoga donne des orientations, mais le vrai travail est à l’intérieur de chacun, physiquement comme mentalement.

 

Où/ comment pratiques-tu?

Aujourd’hui je pratique essentiellement seule chez moi, ou dans un coin de la salle de sport à Bayonne, où je suis abonnée. Je me filme souvent pour avoir un regard extérieur afin de conserver les bons alignements. Dès que je me trouve dans le même coin que d’autres amis professeurs de yoga, je mets tout en œuvre pour pratiquer avec eux. De temps en temps je vais jusqu’à Yoga Bikram Hossegor et lorsque je me rends à Nice voir mes parents, je pratique à Yoga Bikram Nice. Ce sont deux studios extrêmement chaleureux (sans mauvais jeu de mot !) et dont les directrices (respectivement Gabrielle et Manu) sont d’une immense bienveillance.

 

Quel est ton mantra?

« On a l’âge de sa colonne vertébrale » (en VO : You’re only as old as your spine is). C’est une phrase de Mary Jarvis, une sorte de légende vivante au sein de la communauté du yoga Bikram. Dans tout ce que je fais, chaque posture, de la plus simple à la plus avancée, chaque mouvement, je me concentre sur ma colonne vertébrale et les bénéfices qu’elle peut en retirer. Le reste est secondaire.

 

Pour en savoir plus sur Jess : 

Mon site : https://www.yogatechnique.net/

02 mai, 2020 — Patricia Nagelmackers